Tomi, reviens vite... extrait 40

« "N’avez-vous jamais regretté que Chimène ne tue point Rodrigue alors qu’il le lui demandait ?" "Pourquoi dans la littérature romantique, les femmes tombent-elles comme des mouches ?", telle sont les questions que Patricia aurait aimé poser à ses professeurs de lettres.

Patricia n’avait point un esprit révolutionnaire ; pourtant des questions, elle en avait plein la tête :

"Pourquoi les univers-créateurs sont étrangement dépourvus de femmes ? Pourquoi les héroïnes, aussi sublimes soient-elles, flanchent-elles toujours au dernier moment, c’est-à-dire à cet instant précis où il faudrait s’affranchir des contingences du cœur, se dresser seule face au monde pour s’affirmer ainsi divine créatrice d’un acte neuf qui ne procèderait que de soi ?"

Patricia ne supportait plus cette littérature qu’on lui avait infligée au collège et au lycée : comme si quelque chose était truqué dans cette littérature, un énorme piège dans lequel l’impuissance de la femme est affirmée sans jamais en dévoiler les raisons. Comme s’il s’agissait de lui faire comprendre qu’elle est inférieure parce qu’elle ne crée pas, et qu’elle ne crée pas pour une raison qui échappe au contrôle de l’être humain. » (p. 103)