Tomi, reviens vite... extrait 18

« Quand Georges s’engagea très jeune en politique, chez les "rouges" (comme il disait), il pensait que c’était adhérer à une conception, une pensée, une organisation totales du monde et de la vie. Aux antipodes de la solitude qu’il vivait et redoutait. Cet engagement était dû sans aucun doute à ses anxiétés adolescentes. En vieillissant, il savait qu’il n’avait plus besoin, ou de moins en moins, d’une structure de pensée cohérente, et pourtant il continua longtemps. Ce fut peut-être la maldonne de sa vie. Ses capacités à faire de la politique l’entrainèrent à persévérer dans cette façon de vivre et il lui fallut de trop longues années pour s’apercevoir que son but essentiel était la défense de l’individualité de la vie. Cette constatation aurait dû l’amener beaucoup plus tôt à en tirer la conséquence pour lui-même d’abord, c'est-à-dire à vivre pour lui, par lui, à travers lui, donc d’écrire et non pas avoir une action à caractère social ou politique. C’était comme si, par son engagement, la liberté lui avait été retirée en l’empêchant de repenser sa vie, sa totalité : il avait le sentiment – dans ses dernières années – qu’il s’était "gouré". » (p. 42)